Ségur : Accord et désaccords chez les personnels non médicaux
Ségur : les mesures destinées aux personnels hospitaliers non médicaux n’ont pas fait l’unanimité chez les syndicats de ces professions. Éclairage non exhaustif à partir de l’accord divulgué mardi 21 juillet par Nicole Notat et Olivier Véran.
Rémunérations : revalorisation en plusieurs temps
Une augmentation globale de 183€ net par mois est proposée à tous les agents non médicaux des hôpitaux publics. Mais celle-ci ne sera pas effective en une fois et immédiatement. Les salaires seront augmentés de 90€ en septembre 2020 mais le versement de cette majoration pour les mois de septembre, octobre, novembre et décembre 2020 se fera en une fois en janvier 2021. Une deuxième augmentation de 93€ sera effective à compter du mois de mars 2021.
Organisation du travail et aménagement des 35 heures
Les mesures proposées visent principalement à assouplir les conditions de travail des personnels paramédicaux et à inciter à faire des heures supplémentaires.
Concernant l’assouplissement, deux mesures sont particulièrement nouvelles : la possibilité d’annualiser le temps de travail et la diminution du repos quotidien à 11h. L’annualisation du temps de travail va permettre d’adapter le volume horaire des agents en fonction de l’activité. Autrement dit, de faire travailler plus les agents lorsque les services sont en tension et moins lorsque ces derniers le sont moins. C’est une mesure à double tranchant car si elle permettra certainement de dégager plus de jours de repos sur le long terme, elle va aussi intensifier certaines semaines des agents paramédicaux notamment en période de forte pression sur l’hôpital public comme lors des épidémies de grippe (ou de Covid…). Cela pourrait être porteur d’une augmentation des risques psycho-sociaux pour les personnels et de diminution des effectifs disponibles dans les services.
La diminution du temps de repos quotidien qui passerait donc de 12h à 11h est une autre manière d’allonger le temps de travail, notamment quotidien.
Ces deux mesures semblent être pensées dans une logique du « travailler plus pour gagner plus ». En effet, les semaines plus chargées et les journées plus longues seront valorisées par l’augmentation de la reconnaissance des heures supplémentaires. Cependant, personne ne sait si cette reconnaissance passera par une revalorisation des indemnités d’heures supplémentaires ou par du repos supplémentaire ?
Concertation et vie sociale des établissements
Le rapport Notat souhaite également que le dialogue social reprenne de la place au sein des hôpitaux. C’est une intention louable dont l’ISNI comme tous les syndicats professionnels ne peut que se réjouir. Ces négociations par établissement permettront d’après le projet dévoilé mardi 21 juillet concernant les soignants de dégager des accords collectifs sur le temps de travail mais aussi sur l’intéressement.
Cette notion d’intéressement collectif a été introduite par un décret de mars 2020. Il s’agit en fait de donner la possibilité aux établissements de verser une prime à ses agents (tous ? certains ? ) en fonction des résultats de ceux-ci sur certains indicateurs. C’est un peu comme un intéressement sur le bénéfice d’une société privée. Pour l’instant, les indicateurs qui seront pris en compte sont inconnus.
Cette mesure est intéressante mais est porteuse de risques car tout va dépendre des indicateurs. Si les indicateurs retenus sont comptables/quantitatifs (ex: nombre d’hospitalisations par service, nombre de toilettes réalisées par un agent par semaine, etc.) comme c’est souvent le cas avec la tarification à l’activité, ce genre de mesure risque de pousser les agents à faire du chiffre et peut dégrader la qualité des soins. Si les indicateurs sont qualitatifs, sur la qualité des soins, il sera important d’être vigilant à ce que les moyens soient mis en place en regard pour que les agents puissent réellement atteindre ces objectifs.
Il ne suffit pas de vouloir, il faut pouvoir.
Signataires et discorde entre centrales syndicales
Pour rappel, les organisations représentant le personnel non soignant et paramédical lors du Ségur étaient au nombre de cinq : la CGT-Santé, Sud-Santé-Social, FO-Santé, CFDT et UNSA-Santé. Sud a claqué la porte dès le début du Ségur (ou quasiment) critiquant avec force la méthode de la concertation. La CGT est restée tout en étant particulièrement critique sur le fond et sur la forme, elle ne signera logiquement pas ces accords.
Les centrales signataires sont donc la CFDT, FO et l’UNSA. Parmi ces-derniers, la CFDT et FO sont les plus fervents défenseurs de l’accord, l’UNSA a signé tout en émettant des réserves, notamment sur les concessions faites en face de la revalorisation salariale.
Cette division du front syndical des personnels non médicaux et paramédicaux s’est retrouvée chez les praticiens hospitaliers.